Dans ce
post, Serge Simon nous livre son sentiment sur une notion propre au rugby : la
liaison. En effet si on résume le rugby par un geste technique, on peut
utiliser cette notion de liaison. Mais joue t elle un rôle sur le comportement
social d’un rugbyman ? Et est-elle réellement invisible aux yeux des
spectateurs?
Conférence dans une grande
entreprise le 26 octobre 2007
Serge SIMON
A partir du moment où le rugby a choisi de conserver cette essence du combat qui
est la ligne d’affrontement, il a également conservé quelque chose qui a
disparu dans les autres sports, un geste technique, très particulier, invisible
des médias et des spectateurs, qui se reproduit éternellement sur un match : la
liaison.
Le rugby
est le seul sport dans lequel on doit se lier à son partenaire. Au rugby,
pendant des centaines d’entraînements et de matches, on vous fait travailler la
liaison, surtout pour les joueurs de devant. Pendant des heures et des heures,
on vous apprend comment vous lier aux autres. Si vous n’êtes pas liés les uns
aux autres pendant la mêlée, vous explosez : vous êtes littéralement
piétinés et broyés. Je ne suis pas dans la métaphore : se lier à l’autre de
manière extrêmement serrée et extrêmement forte est une nécessité dans le
rugby. Comment imaginer qu’au fil des années et des entraînements, de l’âge de
huit ans jusqu’à l’âge de vingt ans, au cours de ces années où vous construisez
les règles de votre monde, cet ancrage physique de la nécessité d’être lié à
l’autre n’influence pas votre comportement social ? Nous touchons, à travers ce
geste technique très simple, à l’une des caractéristiques de la psychologie du
rugbyman, du fin fond des Pyrénées à l’autre bout du monde. Observez les
rugbymen avant, pendant et après les matches. Prêtez attention à la liaison,
vous ne verrez plus qu’elle. Les rugbymen se cherchent et se touchent en
permanence, avant, pendant et après les matches. Tout l’univers du rugby est
construit autour de la liaison : la troisième mi-temps, les valeurs, etc. Cela
n’est pas forcément un avantage dans cette société moderne. Mais cette
nécessité absolue de liaison est ancrée dans chaque rugbyman : les joueurs
essaient en permanence de construire ce collectif, cette entité collective.